• Attention, il ne s'agit en rien d'un exercice complet ou à recopier bêtement.

     

    L’État désigne une entité juridique chargée de promulguer des lois et de les faire appliquer. L’État est une notion impersonnelle, elle suppose une administration, et s'oppose au pouvoir direct ou au prestige sensible du chef.

    Notion forgée vers la Renaissance, elle met l'accent sur les notions d'ordre (lois) et de stabilité (principe de continuité de l’État. cf étymologie : statuts : état, stabilité).

    Depuis Hegel, on a coutume en philosophie politique d'opposer l’État à la société civile. La société civile désigne le corps social concret que l’État tente d'ordonner selon un projet et un idéal commun.

    II - L'ANALYSE DU PROBLEME

    Le problème se pose donc ainsi : l’État doit-il mettre en forme la société, la réduisant à n'être qu'une matière informe en elle-même que l'on devrait ordonner du dehors ? Ou bien la société civile n'a-t-elle pas sa propre structure ainsi qu'une capacité à proposer des projets et des idées, l’État se contentant de traduire juridiquement des demandes sociales ?

    De plus, le problème n'est pas seulement de savoir si l'on peut ("peut-on ?") imposer une norme froide au corps social, mais si on le doit, est-ce à l’État de prendre en charge tout le projet politique ? Le sujet pose donc un problème de choix : qu'est-ce qui est souhaitable ? Il renvoie à l'opposition entre le collectif et l'individuel.

    Est-il souhaitable que l’État prenne en charge toutes les dimensions de notre existence ?

    III - UNE DEMARCHE POSSIBLE

    A - LE SPECTRE DU DESORDRE

    La perspective du tout-politique ne prend son sens que par la hantise du désordre toujours possible des individus, cette préoccupation est sensible dans les philosophies qui problématisent l’État de nature. Selon Hobbes, sans État, "l'homme est un loup pour l'homme". En effet, l'individu recherche son intérêt et s'oppose ainsi aux autres.

    La violence étant toujours possible, il faut donner tout le pouvoir à l’État (Léviathan) dont la vertu est d'être au-dessus des parties, donc d'être impartial et pacificateur. Ainsi, pour conjurer "la guerre de tous contre tous", les individus doivent aliéner leurs pouvoirs et le remettre à un Tiers, l’État.

    On retrouve cette notion d'aliénation chez Rousseau : dans la société civile non réglée par le contrat social, règne la loi du plus fort. L'attribution de la propriété, par exemple, doit passer par la médiation collective de l'assemblée du peuple et non pas résulter d'une prise de possession de fait. Si l’État dit le droit, ma propriété est reconnue par la collectivité. La parole publique chasse donc le spectre de la violence privée.

    Ainsi, si l’État doit créer de la cohésion sociale, il faut tout en attendre du point de vue politique de la coexistence des individus.

    B - FAUT-IL ECOUTER LA SOCIETE CIVILE ?

    La célèbre injonction du philosophe Michel Foucault nous amène cependant à la question suivante : la société civile (hors État) n'est-elle que la somme d'individus égoïstes ou n'est-elle pas déjà structurée selon des intérêts collectifs préexistant à l’État ? George Dumézil a mis en évidence la structuration de toutes les sociétés indo-européennes traditionnelles en trois classes : ceux qui prient (clergé), ceux qui défendent le peuple (la noblesse), les producteurs (paysans, artisans). Marx distingue dans les sociétés modernes deux classes : ceux qui détiennent des capitaux ("les capitalistes"), ceux qui n'ont que leur force de travail ("prolétaires").

    Enfin les sociétés contemporaines sont structurées en syndicats, mouvements sociaux, nationaux ou internationaux qui participent au projet politique et à la cohésion sociale.

    Ces mouvements sociaux, visés par Foucault, semblent réduire l’État à n'être qu'un "monstre froid" pour reprendre la formule de Nietzsche. Ou bien ce monstre érige des normes contre le corps social, et c'est le totalitarisme. Ou bien l’État se contente de légaliser ce qui existe déjà dans les faits : on peut songer au problème de légalisation de l'usage du cannabis ou celle du mariage homosexuel.

    C - ETAT ET IDEAL

    Ainsi si l’État assure la cohésion sociale par ses fonctions régaliennes de Justice et de Police, on ne peut tout en attendre, sauf à réduire la société civile à néant. Se pose alors un problème : que doit-on attendre de l’État ? On ne peut accepter l'idée d'un État suiviste. Pourquoi en effet l'individu serait-il aliéné ? Par son État civil, l'individu s'inscrit dans le cadre collectif de l’État, mais que reçoit-il en échange ? La formule de la déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen nous met sur la voie : "Tous les Hommes naissent libres et égaux en droit". L’État doit nous donner les conditions de jouer notre rôle dans la société.

    L'école a été instituée pour cela, l'importance donnée aujourd'hui par l’État à la culture y trouve sa justification.

    L’État ne doit donc être ni un monstre totalitaire ni un instrument au service du corps social, mais ce qui rend possible la coexistence d'individus autonomes, c'est-à-dire libres et raisonnables. Une dialectique subtile s'instaure donc entre État et individu : l'individu s'inscrit dans l’État pour mieux accéder à son autonomie et jouer ainsi son rôle dans la société civile qui préside à notre aliénation volontaire à l’État.

     


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